Tintin au-delà des idées reçues

Patrice Guérin est l’un des rédacteurs récurrents de la rubrique « Actualités » de Beile. Il vient de publier un nouveau livre, Tintin au-delà des idées reçues, chez l’éditeur Les Impressions nouvelles. Il nous raconte comment il a travaillé.

– Pour commencer, peux-tu te présenter ?

– Je suis tintinophile depuis l’âge de 10 ans, après avoir lu Le Monde d’Hergé de Benoît Peeters. J’ai continué à lire les albums, tout en découvrant aussi les autres ouvrages de tintinologie. Je me souviens par exemple de l’achat du Tournesol illustré d’Albert Algoud, en 1994. À 26 ans, en 2006, j’ai commencé à écrire moi-même des articles sur Tintin, pour Doryphores !, la revue du Cercle Archibald. J’ai publié de nombreux textes depuis, participé à des livres, et présenté une émission de radio pendant un an. À côté, je suis aussi relecteur-correcteur indépendant.

– Pourquoi le thème des idées reçues te tenait-il à cœur ?

– Tintin au-delà des idées reçues est le croisement d’une passion, la vie et l’œuvre d’Hergé, et d’un intérêt pour tout ce qui concerne les perceptions, les fake news, les croyances, etc. Durant les 25-30 dernières années, j’ai lu à peu près tous les livres sur Hergé et Tintin, et j’ai amassé aussi beaucoup de documentation, des coupures de presse, des interviews… Et comme je consulte régulièrement ces documents, j’ai pu constater que des légendes sur Hergé et son œuvre perduraient. Par exemple, plusieurs articles prétendent que l’île Noire est inspirée d’une île française. Il y a aussi cette croyance que Quick et Flupke sont des gamins des Marolles, un vieux quartier de Bruxelles. Et j’avais déjà publié dans Doryphores ! un texte sur le faux télégramme de Dalí, exposé au musée Hergé (et que j’ai repris dans mon livre).

Et puis à l’été 2020, il y a eu une dispute, via les réseaux sociaux et les médias, entre le zoo Pairi Daiza et le musée Art & Histoire de Bruxelles. Chacun affirmait posséder la vraie momie ayant inspiré Rascar Capac. Alors qu’Hergé a pris modèle sur une gravure dans le Larousse ! Il m’a semblé amusant de raconter comment la légende s’était installée.

Mais l’idée d’un livre n’est venue que l’année suivante. On parlait de plus en plus de fake news et de débunkage. Je regarde parfois sur YouTube des émissions comme celles de Thomas C. Durand, consacrées à l’esprit critique en sciences, sur sa chaîne La Tronche en biais. Les interventions de l’Aldhhaa, l’Association de lutte contre la désinformation en Histoire, histoire de l’art et archéologie, sont fondamentales et passionnantes aussi. Et je ne sais plus si je connaissais déjà les vidéos de Yann Bouvier, alias YannToutCourt, un prof qui démonte les idées reçues en Histoire.

Bref, à mon petit niveau, j’ai pensé que faire la même chose sur Hergé serait intéressant, et j’ai travaillé sur ce livre entre le printemps 2021 et l’été 2022. C’est pendant sa préparation que j’ai découvert par exemple de nouveaux éléments à propos du premier film adapté de Tintin, Le Crabe aux pinces d’or. J’ai aussi retracé la véritable histoire d’Arnold et Susan, le couple de Chinois qu’Hergé a rencontré à Bruxelles dans les années 1930. Contrairement à ce que l’on croyait, Hergé ne les connaissait pas encore quand il a commencé Le Lotus bleu. Certaines des idées reçues que je traite ont déjà été démontées, mais il m’intéressait de comprendre comment elles ont germé, et pourquoi elles restent tenaces. Et j’ai été parfois surpris !

– Sur quel sujet aimerais-tu travailler maintenant ?

– J’ai un livre déjà écrit depuis un moment, qui sortira en septembre. Il est consacré à L’Oreille cassée et au fétiche arumbaya. Je prépare d’autres ouvrages sur Hergé, mais je ne préfère pas dévoiler les sujets maintenant, parce que c’est un travail de longue haleine, et je dois parfois en repousser l’écriture à cause d’un manque de temps ou d’informations. Je rassemble aussi de la documentation sur le cinéma et d’autres domaines, pour d’autres projets.

Le tirage de tête (numéroté et limité à 140 exemplaires, avec un ex-libris) est disponible ICI.